L’homme au foyer

Alors que la Journée Internationale de la Femme n’est pas très loin, il est bon de signaler une  organisation familiale qui sort de l’ordinaire et ferait sourire plus d’un macho : L’homme au foyer. L’activité professionnelle de sa femme chez MSF l’amène à travailler à l’étranger, dans des pays dont la stabilité n’est pas ce qui les caractérise le mieux.  Pendant ce temps Monsieur  s’occupe du bien être de la famille et des enfants. Outre cet état de fait, Guy Delisle est également un dessinateur reconnu. Son dernier opus Chroniques de Jérusalem, est un vrai chef d’œuvre qui  raconte, tel un reportage, une année de vie en Israël, mais également les impressions d’un occidental dans un monde très  contradictoire.

Arriver dans un pays étranger, et qui plus est en guerre, n’est pas simple. Guy Delisle profite de ces voyages pour faire des croquis et en publier, sa vie quotidienne. Après Shenzhen, Pyongyang et Chroniques Birmanes, c’est au tour de Jérusalem d’avoir droit à ses chroniques. Autant de souvenirs de voyages  « qui ne sont pas communs et que vous ne trouverez pas chez tout le monde ». Pendant cette année de vie dans les villes des 3 Religions, on profite de la présence de l’auteur pour visiter tour à tour, les différents quartiers  de Jérusalem, les plages de Tel  Aviv, d’Eilat ou les villes « fortifiées » de Jenin ou de Ramallah.

Ambiance souvent contradictoire et révoltante, Guy Delisle sous un trait de crayon et des propos faussement naïfs nous fait vivre la réelle contradiction de ce pays.

L’élément fort du livre c’est la « guerre de Gaza »… 3 semaines de folies meurtrières. La barbarie drapée sous des airs faussement joyeux. Pour ceux qui ont été au moins une fois en Israël, sans avoir à tirer partie d’un camp ou d’un autre, retrouvera les mêmes anecdotes. Et là on se sent très proche de ce vécu qui est aussi le notre. L’entrée sur l’esplanade des mosquées avec le dôme du Rocher érigé comme un fantasme que nous ne pourrons jamais approcher.  La visite du Saint sépulcre, site religieux qui ressemble à tout sauf à un lieu de culte et où en sortant on se demande ce que nous aurions dû comprendre. Pourquoi ces religions minoritaires ne peuvent pas s’entendre ? Et ce mur qui fascine tant Guy Delisle et qui s’expose comme une injustice au dernier degré, est le symbole de la contradiction que vivent tous les habitants, juifs, Musulmans ou Chrétiens de ce pays.

Cette franchise et cette simplicité font tout le charme de cette bande dessinée qui a été reconnue par ses pairs en recevant un Fauve d’Or au Festival de la BD d’Angoulême en 2012. Mais ce qui est le plus important, c’est qu’à aucun moment, l’auteur ne juge. Il constate, il prend acte, il dénonce des fois des incongruités mais n’est jamais militant. Ce livre est un formidable témoignage de son époque et il est bon d’espérer qu’un jour la situation deviendra enfin normale et que tous les Sémites de cette région, de n’importe quelle confession qu’ils profitent de ce pays merveilleux où un petit effort de chacun permettrait de vivre dans un Paradis sur Terre. Alors ce livre sortira de l’actualité et rentrera dans l’Histoire. En attendant, si vous ne comprenez rien au sujet dans les journaux télévisés, après la lecture de ce recueil, vous aurez une autre vision de la situation et de sa complexité.

 http://fr.wikipedia.org/wiki/Guy_Delisle

http://www.guydelisle.com/jerusalem/jeru-index.html